Prisca Thévenot ou « l’engagement collectif »
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Le Sévrien : Après avoir été élue Députée de la 8e circonscription des Hauts-de-Seine, vous voilà à présent Secrétaire d’état chargée de la jeunesse et du Service National Universel. Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs, quel est votre rôle ?
Prisca Thevenot : La volonté aujourd’hui est d’accompagner notre jeunesse à se prendre en main pour être bien ancrée dans notre pays, notre territoire, dans nos villes et qu’elle puisse pleinement prendre sa place. Dès le lendemain de ma nomination au gouvernement, j’ai pris mes baskets et je suis partie sillonner notre belle France (la Courneuve, Annecy, île de la Réunion, Étampes, département de la Creuse). Ces rencontres m’ont permis d’écouter pour mieux comprendre. La jeunesse d’aujourd’hui s’entend sur un point : ils ont le sentiment d’être administrés et non responsabilisés. Nos jeunes veulent être acteurs de leur destin, et ça se comprend. Mon enjeu est donc de leur mettre à disposition tous les outils nécessaires qui leur permettront d’être acteurs de leur destin. Les jeunes sont des acteurs politiques : ils reconnaissent tout ce qui a été fait par le Gouvernement. On veut être dans une démarche de co-construction de l’action publique.
Le Sévrien : La Première ministre Élisabeth Borne a présenté le 21 juin 2023 la feuille de route du Gouvernement pour la jeunesse à l’occasion de la conclusion des Rencontres jeunesse de Matignon. Parmi toutes ces mesures, une concerne le « Pass’sport » avec une réduction de 50 euros pour la pratique de l’activité sportive de leur choix dans plus de 180 000 structures sur tout le territoire pour près de 6,7 millions de jeunes et étudiants boursiers. Pourquoi ne pas ouvrir la possibilité pratique sportive à tous les jeunes ?
Prisca Thevenot : Rappelons que Pass’sports est une aide financière à vocation à offrir aux enfants éloignés physiquement ou financièrement de la sphère sportive. Nous sommes une nation solidaire et l’enjeu est d’être en capacité d’aider collectivement celles et ceux qui en ont le plus besoin. Maintenant, est-ce qu’il faut impérativement ouvrir le Pass’sport à tous les jeunes ? Je ne suis pas si sûre. Dans une circonscription comme la nôtre, bordée d’infrastructures sportives et de forêt, je pense que les jeunes sont pleinement mobilisés pour se saisir de la pratique sportive qui d’ailleurs se développe aussi au sein même des établissements scolaires.
Le Sévrien : La France a un modèle associatif unique. C’est une spécificité tant par son volume, avec pas moins d’1,5 million d’associations sur notre territoire, que par la multiplicité et la diversité des actions qu’elles mènent au service de l’intérêt général. En tant que Secrétaire d’Etat, vous êtes notamment en charge de mettre en œuvre la politique en faveur du développement de la vie associative. Que souhaitez-vous apporter comme mesures ?
Prisca Thevenot : J’étais au Forum des associations à Sèvres pour faire un retour aux associations que j’avais rencontrées l’année dernière, mais aussi pour continuer à écouter et à avancer avec elles. En effet, depuis le moins d’août, depuis ma prise de poste, je rencontre régulièrement les associations sur le territoire. Dans cette optique, j’ai réuni plus de 300 associations au Ministère le 26 septembre pour rendre compte d’un certain nombre de sujets qu’elles m’ont adressé et sur la base desquels nous allons dresser ensemble une feuille de route. Il ne s’agit pas de réécrire l’histoire mais de réfléchir à des pistes d’amélioration.
Le Sévrien : Le SNU, service national universel, s’adresse à tous les jeunes français, garçons et filles entre 15 et 17 ans et a pour objectif d’être « acteur de la citoyenneté ». Pensez-vous que les jeunes soient sensibles à ces termes ?
Prisca Thevenot : Le SNU est très mal connu, et souvent il est caricaturé. Au risque de décevoir, le SNU ce n’est ni l’armée, ni la colo. C’est un moment pendant lequel on apprend à se rappeler qu’on joue dans la même équipe. Et je le dis d’autant plus que nous sommes dans une année olympique et où se déroule en ce moment la coupe du monde de rugby. Je ne vois pas pourquoi chanter la Marseillaise et lever les couleurs devraient être une honte ! Ou alors il faut qu’on s’interroge sur tous les sportifs dans les stades en ce moment, qui font exactement la même chose. Je ne pense pas qu’ils soient en train de se « militariser ». Au contraire, ils se rappellent qu’on a un défi à relever ensemble, peu importe nos origines et notre profil. Le SNU, c’est une aventure collective.
Le Sévrien : Il y a un, lors de notre première rencontre, nous vous posions la question suivante « Vous êtes maman de deux enfants. Est-ce que concilier vie de famille et vie politique est facile en tant que femme ? » Aujourd’hui, est-ce toujours le cas ?
Prisca Thevenot : Je crois que je vais vous décevoir. Est-ce que c’est toujours facile, non. Est-ce que c’est impossible, non plus. Est-ce que j’ai à me plaindre ? Encore moins. J’ai choisi en responsabilité. J’impose ma règle. Je veux que les jeunes soient acteurs de leur destin, il faut également que je sois actrice de mon quotidien ! Cet engagement est rendu possible aussi car j’assume qu’il ne soit pas individuel. C’est profondément une histoire d’équipe avec mon cabinet et les militants du quotidien. Comme sur le Forum des associations à Sèvres, mes enfants m’accompagnent et cela devient un moment sympathique pour tous. Cela me permet de passer du temps avec eux en leur faisant partager ce que je vis comme engagement.